lundi 25 juin 2012

trois jours ailleurs

 
Je me souviens de Bologne dans la première semaine de juin. Je marche dans les rues, sous les soixante-dix kilomètres d’arcades, même si l’intensité du soleil n’a pas encore besoin que l’on s’en protège. Je fais des photos, je mange des glaces  arancia, yaourt, pamplemousse rose. Il n’y a plus de parfum cédrat, celui qu’on dit être le meilleur. Revenir, alors. Je mange, évidemment, des tortelloni, de la burrata di buffala. La septième des sette chiese est celle que je préfère, la plus ancienne, la plus dépouillée. Une messe au Xè siècle, c’était comment ? Je perds mon petit bracelet rouge dans la campagne bolognaise. Il ne me reste plus qu’à l’imaginer au pied de la grande maison abandonnée, celle aux couleurs des toiles de Morandi, celle habitée par le fasciste, dans les années quarante et dont personne ne veut plus. Je me souviens déambuler lentement dans Santa Maria dei servi au son du répétiteur d’orgue qui annote sa partition, je me remplis des fragments des fresques dans le manque de lumière de la basilique. Sur un mur, un chien cherche une caresse vers une main qui se tend, une femme enceinte assise, une écuelle, tout le reste a disparu. Il est vingt et une heure, nous rentrons dîner en marchant doucement. Je me souviens dans l’après-midi avoir croisé des femmes élégantes dans leur petite robe noire, leurs chaussures qui dénudent les pieds, les ongles peints d’un rouge éteint qui s’accorde aux « tenda rossa » des fenêtres. Un autre jour, dans un appartement comme une caverne de la via Marsala où les étagère emplies de dvd couvrent les murs, nous regardons quelques images de Bright Star. Les très jolis vêtements de l’héroïne, les lumières d’une autre campagne. Être ailleurs. Être à Bologne pour trois jours. Et puis, à l’escale de Munich ou Monaco, il pleut, j’achète un crayon pour prendre quelques notes avant qu’elles ne s’échappent, avant que le retour de l’ailleurs ne fasse son travail. Pour l’en empêcher tout à fait, le chérubin en bois acheté au marché prendra place dans notre salle de bain.

mercredi 6 juin 2012

une belle semaine passée

 
Je me souviens, c'était il y a quinze jours (Alzheimer, tiens-toi loin de moi).
Le jour du carnet ligné orange, de la pluie sans fin et donc, du parapluie rayé qui s’envolera au premier vent, le jour où je n’achète pas de livre, de film, de vêtement, car je n’ai pas de désir, un jour d’errance : l’outil indispensable au travail ne fonctionne pas. Demain, c’est mon anniversaire. f. m’offrira un bracelet à la couleur incertaine car changeante, un vêtement gris aux manches dans lesquelles on glisse le pouce, un film thaïlandais, un dîner parfait. Ici se glissera aussi un tout petit paquet qui fait une grande et belle surprise et une plaquette de chocolat délicatement parfumée à la rose. Une jolie jeune femme poussera la porte du travail à onze heures tapantes et me déposera un bouquet de fleurs enveloppé de papier blanc et simple. Tout sera bien, et le jour d’hier s’envolera. Cette semaine, enfin, nous dînerons sur la terrasse, ça veut dire du soleil, une température clémente et un temps plus lent entre le premier verre et l’assiette pleine de légumes de couleur verte cuits à l’étouffée avec le riz sauvage (ajouter un émincé de citron confit et une pincée de piment d’espelette une fois la cuisson aboutie). En guise de week-end, nous réfléchirons sans fin et sans solution à transformer notre terrain en jardin. émile semble comprendre nos états d’âme : il se couche tous les soirs à la même heure SUR les herbes aromatiques que je m’évertue à faire pousser. Nous avons donc un chat qui sent le basilic et le romarin ! Nous aurons aussi déjeuné de sushis en agréable compagnie et oublié d’aller vernir une exposition.