La toile cirée en orange.
Nous allons dîner plusieurs soirs sur cette toile cirée, dans cet
appartement du centre de Bruxelles. Dany Wilde et Brett Sinclair sont en photo
dans le couloir et aussi dans la chambre. J’adore.
Pour notre premier soir bruxellois, car il est très tard,
nous dînerons dans une cantine vietnamienne d’un bol de nouilles artisanales,
délicieuses. La première bière de f. est
chinoise !
Il est presque minuit et nous sommes attablés dehors, il
fait bon. Autour de nous, les gens
prennent leur temps et goûtent cette tiédeur soudaine.
Le lendemain matin, nous
cherchons la boulangerie réputée. Il pleut. F. chante une chanson des
frères Jacques. Je ne crois pas qu’il y ait de corrélation entre ces deux
faits. Il pleuvait avant et nous passons devant le restaurant « la Marie Joseph ». Il est
question de marins bretons pas du tout maussades.
Nous rentrons dans l’appartement orange, manger nos brioches
aux raisins, le pain aux céréales. Nous avons le temps de quelques lectures
avant l’ouverture des musées royaux des Beaux-Arts. Une des premières toiles
que je vois est une annonciation du Maître de Flémalle. Pas besoin d’aller plus
loin, celle-là suffirait à mon bonheur, à ma journée, à mon séjour d'une semaine.
D’ailleurs, nous pourrions voyager dans cette
frugalité : aller à Lisbonne voir la tentation de Saint Antoine, à
Copenhague, la maison jaune de Per Kirkeby, quatre ou cinq Hammershoi à
Ordrupgaards, allez à Amsterdam pour Floris Claesz van Dijck, à Florence,
n’aller qu’à Santa Felicità, au bout du Ponte Vecchio, pour la descente de
croix de Pontormo, en profiter pour ne pas
retraverser et rester de ce côté du pont, à Paris, faire trois heures de queue
pour ne voir que les Bonnard d’Orsay …
Mais en trois jours, nous verrons le musée Oldmasters, le
musée moderne, le musée fin-de-siècle, le musée Magritte. Jan Fabre déjà chez
les Oldmasters, pour notre plus grand plaisir (waxes and bronzes). Absolument réjouissant.
Bruxelles, c’est traverser la ville en tout sens en marchant
doucement, regretter d’être en avion et ne pas pouvoir ramener les luminaires
années 30 des brocanteurs, se dire qu’il est l’heure de manger une gaufre et
faire une vraie étude chez Dandoy entre la belge et la liégeoise, ne pas être
d’accord. Marcher encore deux ou trois
heures avant le cornet de frites. Regretter de ne plus avoir très faim pour les
moules, les huîtres, les poissons de chez Oysters and Smorrebrod (on mange
debout dans la rue, mais seulement jusqu’à 18h). Tels de vrais Bruxellois, nous
nous sommes réfugiés chez Toone déjeuner d’un platekeis (merci Dominique).
Pendant que je rêve
de voyages frugaux quant aux visites muséales, f. fait de vraies études
comparatives dignes de guides touristiques : New York et son cheese cake
(le must, c’est ici ou alors dans le quartier ashkénaze), Copenhague et ses smorrebrod, Bruxelles et
ses bières. Il faudra donc revenir encore et encore, une semaine ne permettant
pas d’épuiser la question. Imaginer un étranger en terre française
s’intéressant aux pinards, aux fromages …
On a pris le train, on s’est arrêté à Mons, puis on a pris
un bus pour aller au Grand Hornu voir une exposition de Christian Boltanski. Il
faisait très beau. L’exposition était très belle et nous a rendu un peu triste,
à moins que ce ne soit la ville ou un peu des deux.
Le chocolat et la bande dessinée nous ont totalement
échappés. Je rêve de revenir et de prendre le train pour Ostende, Bruges, Gand,
Liège.
Je ramène un réveil design comme j’en avais rêvé, un bijou
seventies acheté là où Tintin a trouvé la Licorne et une perle de prière
tibétaine. Je ramène des images, des saveurs, des odeurs, des sensations de
marches lentes au bras de f.